La gestion de l’avulsion et des traumatismes dentaires

Déc 15, 2021
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L’avulsion est définie comme le déplacement complet d’une dent de son alvéole dans l’os alvéolaire en raison d’un traumatisme (Andreasen, et al., 2003) et est l’une des plus graves de toutes les blessures dentaires. On estime que l’avulsion d’une dent permanente représente 0,5 % à 16 % de toutes les blessures dentaires (Andreasen, Andreasen, Andersson, 2007). Elle survient le plus souvent entre 7 et 14 ans, affectant les incisives centrales maxillaires (Trope, 2011).

Andreasen, et al. (2003), ont constaté que dans la dentition permanente, les incidences maximales pour les garçons se situent entre 9 et 10 ans, lorsque les jeux énergiques et les activités sportives deviennent plus populaires (Figure 2) – un scénario similaire à celui qui a été présenté à l’auteur.

Présentation de cas

Table des matières

Cet article a pour but de discuter de la prise en charge immédiate d’un enfant de 10 ans qui avait fait tomber son incisive centrale supérieure 45 minutes avant de se présenter au cabinet dentaire.

Pour que l’auteur puisse déterminer le meilleur traitement pour ce cas, il est très important d’obtenir des antécédents médicaux, dentaires et d’accident minutieux. L’auteur utiliserait les dossiers cliniques, qui permettent d’enregistrer les données cliniques et historiques associées à la blessure, en s’assurant qu’aucune information pertinente n’a été omise (Andreasen, et al., 2003). Une autre raison importante de disposer de bons dossiers dentaires dans les cas de traumatisme est la possibilité d’une action en justice de la part du parent, du tuteur ou du patient.

Plusieurs options existent pour gérer ce cas (figure 5). La solution la plus simple à long terme est de le replanter. En 1980, Andreasen a constaté que chez les singes, dans des conditions idéales, la cicatrisation complète de la pulpe et du ligament pério-dontal (LDP) des dents replantées peut se produire. Cependant, le succès de la replantation dépend de l’appréciation et de la collaboration avec les processus biologiques humains.

Le tableau 1 illustre les facteurs à prendre en compte pour une prise en charge optimale du patient. L’auteur va considérer chacun de ces facteurs afin de déterminer la meilleure façon de traiter ce garçon de 10 ans. Les objectifs de ce traitement sont de rétablir la position normale de la dent (forme, couleur et contour gingival esthétiquement agréables) et la fonction de la dent (capable d’inciser les aliments sans douleur et sans mobilité).

Facteurs dentaires
La santé de la pulpe et du ligament parodontal (PDL) sont les tissus clés qui affectent le pronostic de la dent avulsée (Andreasen, et al., 2003). Les cellules du PDL sont essentielles pour permettre à la dent de se rattacher à l’alvéole. Lorsque le ligament est trop endommagé, la guérison se fait par remplacement osseux, et la dent est remplacée par l’os et perdue en quelques années. Ce phénomène est connu sous le nom de « guérison osseuse »/ankylose/résorption de remplacement (RR) (Andreasen, 2007). Les cellules pulpaires aident à lutter contre l’infection, la nécrose et, à leur tour, à prévenir la résorption inflammatoire (Andreasen, et al., 2003).

Immédiatement après l’avulsion, les cellules pulpaires et PDL commencent à subir des lésions ischémiques, qui peuvent être aggravées par le séchage, les bactéries et les irritants chimiques. Ces facteurs provoquent la perte de vitalité de ces cellules PDL et la déshydratation des cellules pulpaires, qui sont inestimables pour la survie de la dent (Andreasen, et al., 2003 ; Barrett, Kenny, 1997 ; Gregg, Boyd, 1998 ; Andreasen, et al., 1995). La figure 3 illustre que lorsque le temps extra-alvéolaire sec augmente, la cicatrisation pulpaire et PDL est réduite.

De nombreuses études menées par Andreasen, et al, en 1995 ont montré que le résultat du traitement dépend fortement :

  • Durée extra-alvéolaire
  • Milieux de stockage

Andreasen, et al. (1995), ont démontré dans une étude clinique que la replantation immédiate (dans les 5 minutes) était l’un des facteurs les plus critiques nécessaires à la régénération du PDL et au retour à une fonction normale. Andersson et Bodin (1990) ont découvert que les dents replantées dans les 15 minutes avaient un pronostic favorable à long terme, et que la plupart des dents replantées dans les 10 minutes ne subissaient aucune résorption.

Plus récemment, il a été constaté qu’un stockage à sec de plus de 15 minutes entraîne l’échec de la reproduction des cellules précurseurs du côté radiculaire du PDL et de leur différenciation en fibroblastes (Kenny, Barrett, Casas, 2003). Même si la dent avulsée est ensuite placée dans un milieu liquide avant d’être replantée, il en résulte une « réparation » défavorable par opposition à la « régénération » favorable et cela conduit à l’ankylose, à la résorption radiculaire et à la perte éventuelle de la dent (Donaldson, Kinirons, 2001).

Donc, idéalement, la replantation au site de la blessure conduit au meilleur pronostic à long terme. Il est donc essentiel d’éduquer ou d’informer les enseignants, les entraîneurs, les soignants, les parents, le personnel médical et, surtout, les dentistes, sur les soins à apporter aux traumatismes dentaires. Une étude réalisée en 2001 par Blakytny, et al, a montré que les raisons de la réticence à la replantation chez les enseignants, les entraîneurs et les soignants étaient les suivantes :

  • Formation inadéquate
  • Réticence à induire de la douleur/peur chez l’enfant
  • Crainte d’une infection transmise par le sang
  • Crainte d’un remplacement incorrect
  • Crainte des conséquences légales

Milieu de stockage
Le milieu de stockage avant la replantation a un grand effet sur la résorption radiculaire et la guérison pulpaire.

L’auteur se présente avec un temps extra-alvéolaire sec de 45 minutes. Par conséquent, au cours de l’anamnèse et de l’examen, si la dent avulsée n’est pas dans un milieu humide, l’auteur placerait immédiatement la dent dans du lait frais emballé dans de la glace pour éviter un séchage supplémentaire. La dent serait manipulée avec soin pour éviter d’autres dommages au PDL.

Les complications telles que la résorption radiculaire sont un grand danger pour le pronostic de la dent avec une occurrence de 50% à 76% lorsque les conditions cliniques sont loin d’être idéales (Andreasen, et al., 1995). Les autres moyens que l’auteur pourrait envisager sont les suivants :

  • Salive du patient : Selon l’auteur, chaque cas doit être évalué individuellement. Le risque d’aspiration/de déglutition doit être pris en considération. Il faut également noter que cela pourrait ne pas être agréable pour l’enfant après une blessure traumatique.
  • Lait emballé dans de la glace : Maintient la capacité des cellules précurseurs à se reproduire deux fois plus longtemps que le lait à température ambiante (Kenny, et al., 2003).
  • Solution saline équilibrée de Hank : solution saline isotonique équilibrée reconstitue les métabolites cellulaires appauvris. Pas facilement disponible.
  • Milieu de culture tissulaire (ViaSpan®) : Milieu de culture tissulaire. Pas facilement disponible.
  • Substances bioactives (dérivé de la matrice de l’émail, Straumann® Emdogain™) : Facilite la régénération du PDL. Recherches complémentaires nécessaires.

L’eau du robinet est un milieu insatisfaisant, car elle rompt les cellules du PDL par osmose (DPB, 1999).

Maturité atypique
La racine d’une incisive centrale supérieure achève sa formation lorsque l’enfant a 10 ans. Les directives que l’auteur suivra pour le traitement de cette dent dépendront du fait que l’apex de la racine est ouvert ou fermé. Dans ce cas particulier, l’auteur supposera que l’apex est ouvert.

La figure 4 montre que les dents immatures replantées avaient moins de 50% de survie après 10 ans. Plus de dents ont survécu avec des apex fermés (Andreasen, et al., 2003). Barrett et Kenny (1997) ont également constaté que les incisives replantées avec des apex ouverts avaient un taux de survie considérablement réduit, et que le risque relatif d’échec était 4,2 fois plus élevé pour les incisives immatures que pour les incisives matures. L’auteur supposera que la dent avulsée est exempte de caries et en bonne santé parodontale, et que la paroi alvéolaire est intacte.

Facteurs liés au patient

Cette blessure par avulsion est survenue à un âge crucial pour la croissance faciale et le développement psychologique du patient. La croissance de la mâchoire varie notablement en fonction de la croissance individuelle, qui n’est pas automatiquement liée à l’âge chronologique. De nombreuses études ont montré qu’il est difficile de définir le moment idéal pour l’implantation par rapport à la croissance de la mâchoire (Lux, et al., 2012).

Le moment optimal pour l’implantation est lorsque la croissance est terminée, ce qui peut être déterminé en prenant des céphalographies/radiographies répétées. Cela peut être planifié lorsqu’on envisage de placer des implants ; cependant, lorsque le patient se présente de manière imprévue avec une dent avulsée, le clinicien n’a pas ce privilège du temps de son côté.

Le risque de replantation chez ce garçon en pleine croissance est l’ankylose et l’interférence subséquente avec la croissance alvéolaire résultant en une infra-occlusion. Néanmoins, selon l’auteur, même le maintien de la dent pour maintenir l’os environnant pendant quelques années est considéré comme un succès.

Kawanami, et al. (1999), a constaté que les jeunes filles avaient un risque plus élevé d’infraposition que les jeunes garçons. Cependant, une étude plus récente menée par Petrovic et ses collègues en 2010 n’a pas confirmé cette constatation. D’autres recherches sont nécessaires pour explorer ce domaine intéressant.

La transplantation est contre-indiquée si le patient est immunodéprimé. Si tel était le cas, le médecin du patient doit être consulté et les rendez-vous de suivi doivent être strictement respectés. L’auteur suppose que le garçon est en bonne santé et qu’il ne prend aucun médicament. Les rendez-vous de suivi sont indispensables dans les cas de replantation avulsée en raison des complications potentielles de résorption inflammatoire, d’ankylose (infraocclusion associée), de résorption radiculaire inflammatoire cervicale externe (ECIR) et de décoloration. Il faut insister sur ce point auprès du patient et de ses parents ou tuteurs.

L’auteur supposera qu’il n’y a pas d’autres blessures graves justifiant un traitement d’urgence privilégié. La figure 5 est un organigramme décrivant les conséquences et les options de traitement de la replantation par rapport à la non replantation.

L’auteur est également confronté à un dilemme éthique : replanter ou non. Les devoirs de soins des auteurs sont les suivants (General Dental Council, 2005) :

  • Primer les intérêts des patients et agir pour les protéger.
  • Respecter la dignité et les choix des patients.

Par conséquent, ce processus de prise de décision devrait impliquer le(s) parent(s) et l’enfant. Ils doivent comprendre qu’une décision doit être prise rapidement et qu’elle sera suivie de conséquences (figure 5).

Le but de la replantation de cette dent encore en développement (immature) est de permettre une éventuelle revascularisation de la pulpe et la poursuite du développement radiculaire. En raison du temps de séchage inférieur à 60 minutes et après avoir considéré tous les facteurs ci-dessus, l’auteur se sent obligé de replanter la dent. Malgré un taux de réussite prédictif plus faible, il existe toujours une chance de survie. Par conséquent, si le parent et l’enfant sont consentants, l’auteur replantera.

Il faut souligner que s’il y a des signes évidents d’échec, un traitement de canal serait recommandé. En outre, le risque de résorption de remplacement et de perte ultérieure de la dent est élevé (comme discuté précédemment, 45 minutes de temps sec, pas de milieu de stockage humide, apex ouvert, et le risque accru d’infraocclusion lié à l’ankylose). Les avantages et les inconvénients de la replantation chez ce garçon de 10 ans sont énumérés dans le tableau 2.

Il existe de nombreuses directives publiées pour la gestion des dents avulsées (par exemple, l’American Association of Endodontists, le Dental Trauma Guide, l’International Association of Dental Traumatology, la British Society of Paediatric Dentistry et les directives du Journal of Clinical Pediatric Dentistry), dont le contenu est similaire et qui sont largement suivies pour aider le praticien à fournir des soins optimaux en temps opportun.

Cependant, toutes les directives présentent une lacune majeure. Aucune n’a été testée par un essai clinique formel ni n’a fourni d’informations spécifiques sur les résultats – c’est-à-dire qu’il y a peu de preuves pour étayer les protocoles (discutés plus loin). L’auteur suivra les directives de l’American Association of Endodontists (AAE) (2004) pour gérer ce cas.

La gestion étape par étape de ce cas est démontrée dans la figure 6.

Comparaison des directives

Les directives du Dental Trauma Guide sont contraires aux directives de l’AAE dans les aspects suivants .

Retrait de l’attelle en 2 semaines contre 1 semaine
Un examen systématique effectué par Hinckuss et Messer (2009) a révélé qu’il n’y avait pas de preuves concluantes d’une association entre une attelle de courte durée (14 jours) et une probabilité accrue de guérison parodontale fonctionnelle, de guérison acceptable ou de diminution du développement de la résorption de remplacement. D’autres recherches sont nécessaires – en attendant, l’auteur se conformerait aux directives de l’AAE.

Minocycline hydrochloride microsphères au lieu de la doxycycline
Des études animales ont montré que ces deux antibiotiques améliorent la revascularisation. Le Dental Trauma Guide s’appuie sur les études menées par Cvek et al. (1990) et Yanpiset et Trope (2000), qui ont constaté les avantages de la doxycycline sur les dents de singes et de chiens, respectivement.

En 2004, Ritter et al. ont constaté que les dents de chiens recouvertes de minocycline avant la replantation se sont avérées efficaces. On suppose que les effets positifs avec les antibiotiques se produiront également chez l’homme. Des recherches supplémentaires sont nécessaires.

Suivis moins fréquents

Complications et gestion à long terme (apex ouvert)

Les complications de la replantation sont fréquentes. La résorption liée à l’infection (IRR) peut être détectée dès 2 semaines après la replantation. L’ankylose peut être diagnostiquée 2 mois plus tard ; cependant, elle est plus fréquemment détectée après 6 mois (Andreasen, et al., 1994). Ainsi, les rendez-vous de suivi sont la clé d’un traitement réussi.

Résorption liée à l’infection
Si des signes évidents étaient présents (figure 6), l’auteur continuerait à suivre les directives de l’AAE et effectuerait une extirpation immédiate de la pulpe et un pansement à long terme avec de l’hydroxyde de calcium. L’état de la lamina dura et la présence d’hydroxyde de calcium seraient évalués tous les 3 mois jusqu’à l’apexification.

En revanche, Trope (2011) recommande une procédure de désinfection avec une triple pâte antibiotique et une procédure de revitalisation  » non vitale « . Si cette technique échoue, la technique d’apexification plus traditionnelle est conseillée avec de l’hydroxyde de calcium à long terme ou un bouchon apical avec du MTA.

Il est important de noter que l’IRR peut être arrêté par le traitement précédent, qui supprime la source d’inflammation, mais l’ankylose peut toujours se produire en raison des dommages irréversibles du PDL. Une découverte très intéressante de certaines études a montré que la présence d’hydroxyde de calcium peut augmenter l’occurrence de l’ankylose (British Society of Pediatric Dentistry, 1999).

Ankylose et infraocclusion
L’ankylose et les infraocclusions sont une conséquence probable pour ce garçon de 10 ans en pleine croissance. L’ankylose peut entraîner des infraocclusions et des extractions difficiles ; Les deux sont indésirables car ils laissent un grand défaut buccal, ce qui entraîne des défis esthétiques majeurs lors du remplacement prothétique final.

Une technique plus récente de « décoronation » est basée sur des études expérimentales et cliniques et s’est avérée être une façon assez efficace de gérer une dent ankylosée (Cohenca, Stabholz, 2007). L’auteur adopterait cette technique si l’enfant de 10 ans était confronté à cette situation.

Lorsque la dent est infraoccluse sur environ 2 mm, la couronne doit être retirée et la racine sous la jonction ciment-émail (JCE) submergée, laissant la racine être lentement remplacée par l’os empêchant l’effondrement de l’alvéole. De plus, l’os va maintenant croître au-dessus de la racine submergée jusqu’au niveau des CEJ des dents adjacentes.

De cette façon, la hauteur et la largeur de l’architecture osseuse et gingivale sont maintenues, permettant une réhabilitation prothétique esthétiquement agréable. Les autres complications comprennent la résorption de surface (autolimitée) et l’ECIR (relativement rare).

Apex fermé

Il n’y a aucune chance de revascularisation et un risque accru d’IRR. Ainsi, il y a deux différences principales dans le protocole de traitement pour prévenir cela :

  • Initiation du traitement endodontique 1 semaine après la replantation
  • Dose plus élevée de pénicilline

Conclusion

L’auteur a décrit la gestion immédiate et à long terme d’une dent avulsée. Une dent avulsée présente de nombreuses questions pour le dentiste traitant. Le facteur de réussite le plus important est la replantation immédiate pour la guérison pulpaire et parodontale.

Les études ont montré des lacunes dans les connaissances lors de la gestion des avulsions. L’auteur estime qu’il est nécessaire d’introduire des campagnes éducatives pour élargir les connaissances des protocoles d’urgence et prévenir les traumatismes en premier lieu.

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