Neutropénie chronique idiopathique chez l’adulte : Caractéristiques cliniques dans une étude prospective de 4 ans

Avr 10, 2021
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La neutropénie chronique idiopathique (NCI) est une affection hématologique acquise rare, définie par un nombre absolu de neutrophiles (NAN) inférieur à 1,8 x103/µL chez les Blancs et 1,5 x103/µL chez les Noirs pendant plus de 3 mois, en l’absence ou en présence d’anticorps anti-neutrophiles (formes auto-immunes). La CIN est généralement diagnostiquée après l’exclusion des formes congénitales et secondaires. Les premières sont généralement marquées par des infections fréquentes et sévères, qui surviennent tôt dans la vie, et par un risque accru d’évolution vers une leucémie myéloïde aiguë ou des syndromes myélodisplasiques. Dans cette étude prospective, nous avons suivi 56 patients atteints de CIN (21 hommes et 35 femmes, âge médian 55 ans, fourchette 25-86 ans) pendant une durée médiane de 48 mois à partir de janvier 2009 (10 patients avaient un suivi antérieur de 8 ans et 2 de 10 ans), en nous concentrant sur 1) la sévérité de la neutropénie, 2) les variations des ANC (par des modèles d’équations d’estimation générales GEE), 3) la positivité des anticorps anti-neutrophiles (par test d’immunofluorescence granulocytaire direct et indirect), 4) les caractéristiques de la moelle osseuse, 5) l’incidence des épisodes infectieux, et 6) l’évolution vers des maladies hématologiques clonales définies (leucémie à cellules chevelues HCL, expansion chronique des cellules NK et syndrome myélodisplasique MDS). Les ANC moyens étaient stables dans la plage normale (1,5-6,5 x103/µL) à tous les points de temps considérés ; par l’analyse GEE, une grande variabilité inter-sujet a été observée au cours du suivi (p=0,012), alors qu’aucune variation intra-sujet significative n’a été trouvée. Si l’on considère la sévérité de la neutropénie, 21 patients (47%) présentaient des neutrophiles inférieurs à 1×103/µL lors du recrutement (médiane 0,49 x103/µL, intervalle 0,1-0,969 x103/µL), et 8 cas <0,5 x103/µL. Les NAN moyens observés au cours du suivi étaient significativement plus faibles chez les hommes que chez les femmes (p=0,023) et chez les cas présentant une splénomégalie légère, bien que de façon non significative (11 cas, 20%, diamètre maximal moyen de 11,4 cm par échographie), indépendamment du sexe (analyse multivariée). Des anticorps anti-neutrophiles ont été détectés chez 19/56 patients (34%), et les valeurs moyennes des ANC au cours du suivi étaient significativement plus faibles dans les cas positifs que dans les cas négatifs (p=0,027). Des valeurs lymphocytaires supérieures à la valeur normale supérieure de notre série (3,4 x103/µL) ont été observées chez 5/56 patients (9%). Par immunophénotypage du sang périphérique (N=23), 13 (56,5%) patients présentaient des cellules NK+ absolues supérieures à 0,2 x103/mL (valeur seuil normale des NK), mais toutes inférieures à 2 x103/µL. Une évaluation de la moelle osseuse a été réalisée chez 27 patients : La cellularité médiane était de 35 % (intervalle 13-75), et 10/27 (37 %) présentaient une valeur inférieure à 25 % (seuil d’hypocellularité dans l’anémie aplastique) ; 19/27 (70 %) présentaient des cellules dysplasiques, même si elles étaient inférieures à 10 % et sans caryotype coexistant lié au SMD ; la cytogénétique était normale dans 24 cas (89 %), tandis que 3 hommes, tous âgés de plus de 60 ans, présentaient un caryotype 45, X0 (7, 6 et 3 métaphases respectivement). Enfin, 10 patients (18%) ont présenté une monocytose, et 6 (10%) une MGUS. Une infection nécessitant une antibiothérapie orale ou un traitement antiviral est survenue chez 13 patients (25%) (2 pneumonies, 7 infections des voies respiratoires supérieures, 3 infections dues au virus de l’herpès zoster et 1 infection des voies urinaires), sans relation avec la valeur moyenne des ANC du patient, le nadir de la valeur des ANC, ni avec la présence d’anticorps anti-neutrophiles. Au cours du suivi, en raison d’une suspicion de progression/évolution, 14 patients ont été réévalués par biopsie de la moelle osseuse ou par immunophénotypage périphérique : 4 cas ont été diagnostiqués avec une expansion chronique des NK, 4 avec une HCL, et 2 avec un SMD, une cytopénie réfractaire avec dysplasie unilinéaire (RCUD) et une avec dysplasie multilinéaire (RCMD). Aucune association n’a été trouvée entre l’évolution et les NCA, qu’il s’agisse des valeurs à l’inscription ou des numérations moyennes au cours du suivi, ni avec le sexe, la présence d’anticorps anti-neutrophiles, la monocytose, la splénomégalie, les anomalies de l’électrophorèse et les infections. Les 4 patients qui ont développé une expansion NK présentaient tous des lymphocytes périphériques >3,4 x103/µL à l’inscription (>5×103/µL dans un seul cas), et 3 cas présentaient une augmentation des cellules NK au phénotypage immunitaire périphérique (p= 0,018). En conclusion, la CIN chez l’adulte est une maladie bénigne, avec un taux infectieux non supérieur à celui de la population générale et une grande variabilité dans les valeurs des ANC. Au cours de cette observation prospective, 10 patients atteints de CIN ont évolué, atteignant les critères des hémopathies clonales, suggérant que cette affection mérite un suivi clinique.

Disclosions:

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