La relation entre le nerf facial et le processus condylien : Une étude cadavérique avec des implications pour la fixation interne à réduction ouverte
Abstract
Introduction. Le condyle mandibulaire est le site le plus fréquent de fracture mandibulaire. Le traitement chirurgical des fractures condyliennes par réduction ouverte et fixation interne (ORIF) exige une visualisation directe de la fracture. Ce projet visait à étudier la relation anatomique du tragus avec le nerf facial et le processus condylien. Matériaux et Méthodes. Douze têtes fraîches d’hémi-daviers ont été utilisées. Une approche rétromandibulaire/préauriculaire étendue a été utilisée, l’incision étant basée parallèlement au bord postérieur du ramus. Les mesures ont été obtenues du tragus au nerf facial et au processus condylien. Résultats. La division temporozygomatique du nerf facial a été rencontrée lors de chaque approche, traversant la mandibule au niveau du col condylien. La profondeur moyenne du tissu séparant le nerf facial du col condylien était de 5,5 mm (fourchette : 3,5 mm-7 mm, écart-type 1,2 mm). La division supérieure du nerf facial a traversé le bord postérieur du processus condylien en moyenne 2,31 cm (SD 0,10 cm) en avant du tragus. Conclusions. Cette étude suggère que la division temporozygomatique du nerf facial sera rencontrée dans la plupart des approches du processus condylien. Comme la visualisation de la relation entre le nerf facial et le condyle est souvent limitée, la reconnaissance du fait qu’en moyenne, 5,5 mm de tissu sépare le processus condylien du nerf devrait aider à réduire l’incidence des lésions du nerf facial pendant cette procédure.
1. Introduction
Le processus condylien a été signalé comme le site le plus commun des fractures mandibulaires, représentant 29% de toutes les fractures mandibulaires . Le traitement chirurgical des fractures condyliennes par réduction ouverte et fixation interne (ORIF) exige que la fixation interne et la réduction anatomique soient réalisées sous visualisation directe de la fracture. Un des défis de la chirurgie ouverte pour les fractures du processus condylien est de naviguer dans la complexité anatomique des structures vitales adjacentes, en particulier le nerf facial.
Plusieurs auteurs ont décrit l’emplacement du nerf facial dans la zone préauriculaire. Malgré cela, l’une des complications les plus courantes de la réduction ouverte et de la fixation interne des fractures subcondyliennes reste la parésie et la paralysie du nerf facial.
Notre sentiment est que le chirurgien novice peut bénéficier d’un système de référence permettant de prédire les structures anatomiques critiques. Ce système doit être basé sur des repères anatomiques qui sont (1) facilement identifiables, (2) fixes en position pendant la procédure, et (3) indépendants de la position du patient .
Ce projet visait à décrire les relations anatomiques pertinentes du nerf facial dans la région préauriculaire et à relier ces résultats aux procédures d’ORIF de la région subcondylienne. Plus précisément, nous décrivons les relations anatomiques du nerf avec la mandibule subcondylienne et avec des repères topographiques facilement palpables, tels que le tragus. Nous pensons que ces relations sont particulièrement germaines pour le chirurgien moins expérimenté qui réalise une ORIF pour des fractures du processus condylien.
2. Matériaux et méthodes
Douze têtes d’hémicavers ont été utilisées. Une approche préauriculaire/rétromandibulaire étendue a été utilisée pour permettre une large exposition du nerf facial et de la région subcondylienne. L’incision était basée parallèlement au bord postérieur du ramus. Une fois le tissu parotidien rencontré, une dissection émoussée a été effectuée jusqu’aux branches du nerf facial.
En raison de la facilité de palpation et de la localisation fixe pendant l’ORIF de la région subcondylienne, l’apex postérieur du tragus et le pôle latéral du condyle ont été utilisés comme points de référence pour les mesures.
Les mesures ont été effectuées comme suit (Figure 1(a)) :(1)Profondeur du tissu séparant le nerf facial du col condylien sous-jacent.(2)Tragus (apex postérieur) au condyle (pôle latéral).(3)Tragus (apex postérieur) jusqu’au point où le nerf facial traverse le bord postérieur du col condylien.(4)Tragus (apex postérieur) jusqu’au pes anserinus.Toutes les dissections ont été réalisées par l’un des deux auteurs (H. P. Barham ou A. M. Terella). Les mesures ont été effectuées par l’un des auteurs et vérifiées indépendamment par l’autre.
(a)
(b)
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3. Résultats
La division temporozygomatique (supérieure) du nerf facial a été rencontrée lors de chacune de nos dissections jusqu’à la région subcondylienne. Cette division du nerf facial émergeait systématiquement de manière postérieure et médiale au col condylien et se déplaçait dans un plan oblique. Dans tous les cas, cette division a traversé la mandibule au niveau du col condylien. La profondeur moyenne entre le nerf facial et le col condylien sous-jacent était de 5,5 mm (écart-type : 1,2 mm).
La distance moyenne entre le tragus (apex postérieur) et le condyle (pôle latéral) était de 2,20 cm (écart-type : 0,04 cm), entre le tragus (apex postérieur) et le point où le nerf facial a traversé le bord postérieur du col condylien, elle était de 2,31 cm (écart-type : 0.10 cm), et du tragus au pes anserinus, il était de 2,25 cm (écart-type : 0,10 cm) (Figure 1(b)).
4. Discussion
Une approche ouverte pour le traitement des fractures condyliennes est devenue de plus en plus courante, et plusieurs incisions chirurgicales, notamment préauriculaire, rhytidectomie, rétromandibulaire, submandibulaire et postauriculaire, ont été décrites. Une complication potentielle et dévastatrice de l’ORIF dans cette région est la paralysie ou la paralysie faciale. L’incidence rapportée de la paralysie du nerf facial varie largement, avec une incidence rapportée de 0% en utilisant une approche sous-mandibulaire haute et jusqu’à 30% avec une approche rétromandibulaire (Tableau 1). Nos résultats confirment ceux d’auteurs précédents en suggérant que la division temporozygomatique du nerf facial a une relation anatomique intime avec le processus condylien. Nous tentons de développer ces travaux en mettant en évidence la profondeur des tissus qui séparent le nerf du processus condylien sous-jacent. Lorsque l’on aborde la région condylienne par une approche rétromandibulaire ou préauriculaire, la visualisation de la relation nerf facial-condyle est limitée, et une rétraction modérément forte est souvent nécessaire pour obtenir un champ visuel et un espace de travail adéquats pour l’ostéosynthèse. Bien que la division temporozygomatique (supérieure) du nerf facial ne doive pas être rencontrée lors des approches submandibulaires ou hautes submandibulaires, le nerf est rétracté latéralement et facilement étiré lorsqu’on tente d’obtenir un espace de travail et un champ optique suffisants. En moyenne, seuls 5,5 mm de tissu séparent le processus condylien du nerf. Le chirurgien doit savoir qu’une rétraction latérale ou supérieure aveugle et agressive des tissus mous sus-jacents dans cette région peut facilement entraîner une lésion par étirement et une neuropraxie. La compréhension de cette relation étroite devrait permettre de réduire l’incidence des lésions du nerf facial lors d’une ORIF de la région condylienne.
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En outre, en moyenne, le pes anserinus du nerf facial était situé à environ 2,25 cm antéro-inférieur du tragus, tandis que le nerf facial traversait le bord postérieur de la mandibule en moyenne 2,31 cm antéro-inférieur du tragus. Les mesures et la relation du nerf facial de cette étude devraient permettre d’estimer la position du nerf en utilisant le tragus et le bord postérieur palpé de la mandibule.
Notre opinion est que l’utilisation d’un repère palpable est de la plus grande utilité pour le chirurgien novice, moins expérimenté dans cette région. Les techniques et les mesures permettant de prédire la localisation des nerfs ne sont que des estimations et ne peuvent remplacer la nécessité d’une compréhension anatomique précise et d’une dissection prudente dans la région condylienne. De plus, elles doivent être interprétées en tenant compte de la variation anatomique inhérente et bien documentée du nerf facial.
Plusieurs études ont démontré l’efficacité des techniques pour localiser le nerf facial, le travail de de Ru et al. étant le plus complet et montrant que le meilleur repère anatomique unique pour localiser le tronc du nerf facial est la fissure tympanomastoïdienne (TMF), généralement à moins de 3 mm de ce repère . Ces résultats ont été confirmés par Pather et Osman. Cependant, Pather et Osman ont noté que la fissure tympanomastoïdienne n’était pas un point de repère idéal car elle se trouvait souvent derrière le tendon robuste du muscle sterno-cléido-mastoïdien, ce qui nécessitait une dissection complexe . Ces techniques sont excellentes pour localiser le nerf pendant la dissection mais n’aident pas à fournir une estimation préopératoire de la localisation du nerf dans la région condylienne.
Les limites de cette étude comprennent celles qui sont communes à toute étude anatomique cadavérique. Les tissus opérés à la suite d’une agression traumatique peuvent subir une déformation due à un œdème ou à une perturbation des tissus mous. On peut supposer qu’un processus d’œdème augmente les distances entre les structures s’il est uniformément réparti, et qu’il ne modifie donc pas de manière significative la stratégie opératoire du chirurgien. De plus, il est reconnu que même une dissection anatomique minutieuse pourrait conduire à une distorsion des tissus dans nos spécimens, affectant ainsi les mesures. Enfin, la taille limitée de notre échantillon a permis le calcul des écarts types, mais pas une évaluation de la variation anatomique.
5. Conclusions
La division temporozygomatique (supérieure) du nerf facial a une relation intime avec le processus condylien. Il est essentiel de comprendre à la fois le parcours du nerf et la profondeur des tissus qui le séparent du col condylien. La rétraction des tissus mous pour optimiser le champ optique peut facilement étirer le nerf et entraîner une neuropraxie. La compréhension de cette relation étroite devrait permettre de réduire l’incidence des lésions du nerf facial lors d’une ORIF de la région condylienne.
De plus, le chirurgien novice, moins expérimenté dans la région subcondylienne, peut bénéficier d’estimations de la localisation du nerf facial en utilisant des repères topographiques facilement palpables. Nous suggérons que le tragus et le pôle latéral du condyle peuvent remplir cette fonction.
Approbation éthique
Cette étude est exemptée de l’IRB.
Conflit d’intérêts
Les auteurs déclarent qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts concernant la publication de cet article.